Lors d’une récente visite pour une dégustation du millésime 2019 des crus classés de Pessac-Léognan organisée au Château Couhins-Lurton, Claire Dawson, la directrice communication, m’a proposé de déguster une nouvelle cuvée élaborée par le très enthousiaste et non moins dynamique Jacques Lurton, Président des Vignobles André Lurton.
On le sait, Jacques Lurton possède une expérience importante de vinification des vins de cépages et notamment des cépages bordelais sur terres internationales. Longtemps, il a vinifié, notamment en Amérique du Sud, un cépage mal aimé car mal compris à Bordeaux, la carmenère.
Connu dans le Médoc pour être une « bête à chagrin » comme disent les anciens, ce cépage rustique, assez tannique, demande une grande expérience de vinification pour être adouci et maîtrisé. Une récente analyse ADN permet de définir la parenté de la Carmenère. Il s’agit d’un croisement entre le cabernet franc et le gros cabernet. Ce dernier originaire de Gironde et du Tarn, n’est plus planté aujourd’hui et fut longtemps confondu avec le cabernet franc, alors que c’est un croisement entre le cépage fer et le cépage basque hondarribi beltza, plus connu sous le nom de txakoli.
L’idée de Jacques Lurton était donc de produire un monocépage pouvant porter le nom d’appellation. Une chose impossible à priori. Sauf que le cahier des charges de l’appellation Pessac-Léognan, faut-il le rappeler élaboré en partie par son père André Lurton, le permet. À partir d’une parcelle plantée au Château de Cruzeau, il a donc décidé, sans macération carbonique, mais en utilisant le froid pour « arrondir un peu et laisser le fruit s’exprimer », de produire une cuvée d’environ 700 bouteilles.
Le nom et l’étiquette sont à mettre au crédit de Claire Dawson et de son équipe. C’est en inspectant le parcellaire et sa position géographique dans le vignoble que Claire a eu l’idée du nom et du design de l’étiquette. Tracé Carménère, un nom qui file bien et reste éloquent.
L’expérience est appelée à être renouvelée. « Tout dépend du millésime », affirme Jacques Lurton comme pour laisser comprendre que le cépage est légèrement capricieux. En tout état de cause, cette cuvée « variétale » comme aime à l’appeler M. Lurton est une réussite. Fruitée, gourmande avec des tanins parfaitement veloutés, c’est une expérience gustative des plus intéressantes.
Tracé Carménère – Pessac-Léognan – 2019
Très beau nez de fruits noirs intenses, légèrement herbacé, petite pointe de végétal noble et arômes d’épices et de graphite. Une réelle gourmandise. Le toucher de bouche est tout en douceur, en suavité, en velouté avec une structure plus juteuse que charnue et une fraicheur aérienne en finale. Très long, très fruité et très gourmand. Bravo ! Belle expérience gustative. – 90